Manger du poisson, on aime. Au détriment de la planète, non. Pour essayer de consommer iodé de façon plus vertueuse, sans détruire les océans et polluer notre air, on a demandé conseil à Charles Guirriec, cofondateur de Poiscaille.
Poiscaille, c’est la version marine du panier de légumes : une jeune entreprise qui propose de vous faire livrer, en point-relais, des casiers de la mer en direct des pêcheurs : poissons, coquillages et crustacés, version frais, français, et pêché par des marins soucieux de leur impact sur les océans. Tout ce qu’il faut pour arrêter de consommer des poissons surpêchés de façon industrielle, destructrice et donc non-éthique ou élevés à l'autre bout du monde dans des conditions floues.
« En France, on importe 80% des produits marins », nous explique Charles Guirriec. « Dans la grande majorité des cas, les espèces très consommées comme le saumon ou le cabillaud viennent de Norvège. » De loin donc. Ce qui implique un transport polluant mais ça n’est pas le plus absurde. « Ces saumons norvégiens sont nourris avec des farines animales, fabriquées à partir de poissons pêchés dans les eaux françaises (et délicieux) mais boudés par les consommateurs, comme le chinchard, le lançon ou le sprat. »
Mulet en gravlax
Sa recommandation : acheter et manger plutôt ces espèces mal-aimées qui méritent mieux que de finir en farines à engraisser des saumons d’élevage. « Si on aime le saumon en gravlax, on peut obtenir des résultats tout aussi intéressants avec des poissons comme le mulet, la bonite ou le maquereau », assure Charles Guirriec.
Sa recette : Achetez un filet de mulet (ou de maquereau) et désarêtez-le si besoin. « On fait ensuite mariner le poisson dans un mélange moitié sucre, moitié sel. Si on a la chance d’en trouver, on peut ajouter du fenouil des marais mais ça marche aussi avec de l’aneth. » Mélangez le sucre, le sel, l’aneth. Placez le poisson et la marinade dans un plat, la chair vers le haut. Disposez les brins d'aneth sur la chair du poisson. Couvrez ensuite du mélange sucre et sel. Laissez au réfrigérateur pendant 24 à 48 heures, selon votre goût, et rincez sous l'eau claire. Une fois « cuit » au sel, le gravlax se mange coupé en fines tranches.
Merlu à basse température
« Merlu, merlan, tacaud, lieu jaune… Tous les poissons de la famille des gadinés sont des alternatives intéressantes au cabillaud », explique Charles Guirriec. « Comme le cabillaud, leur chair blanche se détache en flocons, mais ils sont moins chers et on peut les trouver pêchés à la ligne. » Achetez-les entiers, conseille notre expert « D’abord, c’est plus économique, car on n’en perd pas la moitié lors de la transformation en morceaux ou en filets. » C’est aussi un gage de fraîcheur : « Avec la tête, les écailles, les ouïes, on voit beaucoup mieux si un poisson est frais. »
Sa recette : Demandez à votre poissonnier de vider le poisson, sans l’écailler, et cuisez-le entier, dans un four à basse température (entre 80°C et 100°C), pour avoir le goût du poisson au naturel. Glissez simplement un brin de thym ou de romarin dans son ventre, laissez au four une petite heure (pour un poisson d’1kg) et arrosez d’huile d’olive ou d’un beurre blanc à la sortie du four.
Homard grillé au beurre
Pour Charles Guirriec, pour manger écolo et éthique, mieux vaut aussi éviter certaines « crevettes » de supermarché. « Ce sont en réalité des gambas, pêchées au chalut (méthode très destructrice pour les océans et qui empêche la reproduction des poissons ndlr.), en Asie ou en Amérique centrale. Des pratiques douteuses de traitement aux sulfites (pour éviter le noircissement) et d'ajout de gélatine pour gagner du poids sont connues… Une aberration. »
Son conseil : mettre la main sur des bouquets bretons, un tourteau ou une araignée de mer bien vivants, pêchés au casier. On peut aussi attendre le mois de juin pour manger du homard quand son prix devient plus raisonnable (environ 20 euros la pièce contre 50 ou 75 euros pendant les fêtes).
Sa recette : Faites chauffer le four à température maximale (200-250°c) en position grill. Coupez le homard en deux, dans le sens de la longueur. Séparez les pinces. Placez les moitiés, chair vers le haut, sur une plaque. Recouvrez la chair de tranchettes de beurre salé et enfournez la plaque bien haut, dans le four bien chaud. Laissez cuire 8 minutes. Sortez le homard, laissez les pinces et faites-les cuire 5 minutes supplémentaires. Ainsi grillée, la chair sort nacrée comme une Saint-Jacques. Avec du pain frais et des salicornes crues ou poêlées au beurre, c’est un pur régal.