Le 30 décembre 2004 pour clore le journal de 13h sur France 2, Benoît Duquesne lance la chronique “Les 5 dernières minutes”, une série d'interviews exclusives qui clôturent le journal. Ce jour-là, le présentateur reçoit Hélène Darroze l’une “des rares femmes en France à être cheffe avec deux étoiles” au Guide Michelin comme il le précise. C’est l’occasion de revenir sur son parcours, sur son amour pour la cuisine et surtout sur sa place en tant que femme dans un univers majoritairement masculin à l'époque.
“Je m’appuie sur la cuisine de mes grands-mères et j’en suis fière”
Une femme cheffe, une place pas toujours évidente à prendre. Certains chefs se sont d’ailleurs montrés réticents à l’arrivée de certaines d'entre elles dans ce milieu plutôt masculin . C’est le cas à l'époque de Paul Bocuse. Lors de cette même interview, Benoît Duquesne rappelle à la cheffe Darroze les propos tenus par un grand chef lyonnais à l'égard des femmes : “J’ai noté des propos pas très sympas de Paul Bocuse qui avait dit que grosso modo si les femmes n’avaient pas leur place en cuisine, c’est parce qu’elles n’étaient pas très imaginatives et qu’elles faisaient la cuisine de leur mère”. Étonnée, la cheffe Darroze ne se laisse pas déstabiliser et explique au journaliste ne pas le croire : “Je ne me souviens pas de ça. Au contraire, Monsieur Bocuse nous encourage énormément”. Elle désamorce ainsi la situation.
20 ans plus tard, en revoyant les images en vidéo, la cheffe apporte quelques précisions. En effet, deux ou trois jours après avoir été invitée sur ce plateau, Paul Bocuse l’appelle pour lui parler de ce passage : “Il me dit “tu vois Hélène, j’ai été assez con pour dire ça et la manière dont tu as rattrapé le truc, je t’en remercie”. Cela m’avait beaucoup touchée que Monsieur Bocuse m’envoie lui-même ce petit mot" explique la cheffe du Marsan.
Aujourd’hui, elle pense que décrire la cuisine des femmes comme peu imaginative et très traditionnelle est “très macho”. Elle souligne toutefois : “il y a un fond de vérité car je m’appuie sur la cuisine de mes grands-mères et j’en suis fière”.
“On fait un métier qui pour une femme demande de faire des choix”
La place des femmes dans le milieu de la cuisine est un vrai sujet aujourd’hui. C’est encore un défi pour la gente féminine de concilier vie personnelle et professionnelle en tant que cheffe. Lors de la conférence de presse pour la 15ème saison de Top Chef, Hélène Darroze l’évoquait d’ailleurs : “On fait un métier qui pour une femme demande de faire des choix, des choix en tant que femme, des choix en tant que maman. Et c’est vrai que ce n’est pas toujours facile de comprendre qu’on peut être maman autrement, qu’on peut être femme autrement. Il faut avoir ce courage-là de se dire oui, on peut faire les choses autrement".
Si la cheffe a su trouver cet équilibre, il en est de même pour Stéphanie Le Quellec. Elle confiait, il y a quelques mois à nos confrères de Voici, être aujourd'hui épanouie dans sa vie personnelle et professionnelle bien que cela ait demandé beaucoup d’investissement : "J'ai la chance d'avoir un mari qui comprend ma passion, puisqu'il fait le même métier que moi. Il a évidemment fallu s'organiser et faire quelques sacrifices, bien que je n’aime pas trop ce mot", a-t-elle confié avant de poursuivre : "Quand on a eu nos deux premiers fils, pendant sept ans, nous n’avons pas eu les mêmes jours de congés, ni les mêmes horaires, mais ça valait la peine. L’aîné a 20 ans, son frère 18 et le petit dernier a 6 ans”.
Si aujourd'hui, les choses évoluent, il reste encore beaucoup de progrès à faire. Dominique Crenn l'a d'ailleurs confirmé lors de la conférence de presse de Top Chef expliquant ainsi que : “Les médias mettent toujours les hommes en avant. Les congrès, les magazines. Des fois, il nous invite, car ils n’ont pas beaucoup de femmes. Il faut dire les choses comme elles sont. On a l'impression que si on met un homme, on a beaucoup plus d’impact” s'exclame t-elle avant d’affirmer : “On arrête ça. On est là”.