Reconnaissable entre mille pour son chapeau noir, Marc Veyrat, 74 ans, est l’un des chefs les plus reconnus de sa génération. À la tête d’un nouvel établissement à Megève, celui qu’on surnomme le Phénix a été récompensé par 3 étoiles au Guide Michelin. Pourtant, le cuisinier, originaire de Haute-Savoie, ne veut plus aujourd'hui entendre parler du guide. On vous explique pourquoi.
Une expérience traumatisante
Issu d’une famille de paysans, le chef montagnard a ouvert plusieurs établissements à Annecy et Megève qu’il a dû fermer à la suite d'un grave accident de ski en 2006 qui le laissa pendant dix-neuf mois au fauteuil roulant.
Mais sans jamais baisser les bras, le chef décide d'ouvrir en 2013 une réplique de la ferme dans laquelle il a vécu enfant : la Maison des bois. Malgré un incendie en 2015, le cuisinier et son équipe ont décroché une 3e étoile Michelin en 2018. Malheureusement, l'établissement a été rétrogradé par le Guide Rouge l’année suivante contre toute attente. Une désillusion qui a coûté cher au restaurateur. “Ç'a été horrible pour moi, pour tout le monde. Alors peut-être qu'on a fait des erreurs, effectivement. Mais rien n'avait changé dans ce que l'on proposait. Cette décision, c'était quelque chose d'innommable”, confirme-il au Point.
Malgré le temps, la blessure semble toujours aussi profonde chez le chef : “Elle ne se refermera jamais. Un accident, on se reconstruit. Une blessure profonde comme ça, on ne s'en remet pas. C'est une injustice, une trahison. J'ai fait la promotion du Guide Michelin dans le monde entier ! La nouvelle direction, ils ne cherchent que le buzz médiatique. Ils déglinguent Paul Bocuse, Guy Savoy… Tout le monde. On m'a beaucoup sermonné sur le sujet. Mes amis dans la profession m'ont dit : « Marco, on te connaît, on sait qui tu es, on s'en fout. » Mais moi, je ne m'en fous pas !”, s’exclame le cuisinier.
Un nouvel établissement
S’il a passé les rênes de la Maison des bois à sa fille, le cuisinier n’a pas pour autant raccroché le tablier. Il vient en effet d’ouvrir au cœur de Megève une nouvelle adresse qui se veut immersive et gastronomique. “À cet âge-là, normalement, on tire sa révérence. Mais j'ai la niaque et encore plein de choses à dire, intellectuellement, philosophiquement. C'est impossible pour moi de stopper la cuisine. Sinon, j'arrête tout. On me dit que je suis cinglé, mais j'ai besoin de ça… Ça me réveille la nuit !” confirme le cuisinier.
Mais attention, le chef n’a aucune volonté de revanche sur le Guide Michelin, bien au contraire “Que ce soit clair : je ne veux pas être dans le Michelin ! Qu'ils ne se pointent pas ici ! Et je vais leur montrer qu'un restaurateur digne de ce nom peut très bien travailler sans eux”, conclut-il.