De l’urine pour faire pousser des plantes, c’est ce qui pourrait bien se passer dans certains champs dans les semaines à venir. Cette idée peut surprendre. Pourtant, elle est loin d’être nouvelle. A l’Antiquité déjà, les romains récupéraient et exploitaient les déjections humaines à des fins agricoles. Au fil du temps, cette pratique a peu à peu disparu au profit des engrais de synthèse. Mais aujourd’hui, avec le coût exorbitant de ces produits, cet usage pourrait faire son come-back.
Vous n’êtes pas sans savoir que la guerre en Ukraine a des conséquences sur le coût de beaucoup de produits, y compris des engrais. Ces fertilisants étaient majoritairement importés de Russie. Avec le conflit, cette ressource se fait de plus en plus rare et de plus en plus cher. Il fallait donc trouver une alternative pérenne, écologique et économique. L’urine coche toutes ces cases.
L’urine, un engrais comme un autre ?
Vous vous apprêtez à manger des conchiglioni farcis à la ricotta et aux épinards. Dans ce plat de pâtes, il y a beaucoup de nutriments : des fibres, du calcium, du fer, du magnésium, des glucides, du phosphore, du potassium, du sodium, de la bêta-carotène et des vitamines.
Votre organisme assimile une partie de ces apports et rejette le reste par le biais de l’urine. 1L d’urine contient en moyenne 6g d’azote, 1,5g de phosphore et 2g de potassium. Or, ceux qui ont la main verte le savent : l’azote permet de faire pousser les feuilles des plantations.
L’urine dans les champs, c’est pour aujourd'hui ou pour demain ?
Comme le fumier et le lisier (excréments de cochons, ndlr) déjà largement adoptés dans l’agriculture, l’urine a des arguments qui en séduisent plus d’un. D’un point de vue écologique, il s’agit d’un engrais naturel qui ne pollue pas les sols. D’un point de vue économique, 1L de ce fertilisant naturel coûterait seulement 30 centimes d’après FrancetvInfo.
Et du côté du rendement et de la productivité, ça donne quoi ? D’après ce média qui reprend les propos de l’ingénieur et coordinateur du programme de recherche Ocapi Fabien Esculier, on pourrait produire 25 millions de baguettes de pain par jour en récoltant l’urine des franciliens.
Le hic ? A chaque bobo, on prend un Doliprane. Comme le disent en substance des chercheurs du programme Ocapi dans un article de Libération, cette potentielle contamination pharmaceutique de l’urine soulève des questions. Notre consommation parfois excessive de sel oblige à diluer l’urine avant de l’épandre sur les sols.
L'utilisation d'urine fait débat
Concrètement, voici le topo. Vous faites pipi dans des toilettes aménagées qui récupèrent l’urine. De là, le liquide est envoyé dans des centres de collecte pour être séparé. Il ne reste qu’à passer à l’étape de l’épandage dans les champs. En soi, tout paraît ok. Mais des questions logistiques et psychologiques restent en suspens.
Ce qui pose problème, au-delà des changements logistiques et du coût du transport de l’urine, c’est l’acceptation par la population. Et vous, seriez-vous prêts à manger des pommes qui ont poussé grâce à l’urine de votre voisin pour préparer une recette de tarte aux pommes ?
Sources : Libération, Francetvinfo