Et lorsqu’on lui demande pourquoi avoir choisi d’écrire sur ce sujet, la médecin-nutritionniste répond “Je voulais informer sur le rôle du gras et surtout rassurer car, dans des proportions raisonnées, le gras un organe utile. C’est d’ailleurs parce qu’il est utile au corps qu’il est si difficile de s’en débarrasser”.
“Oh je sais, vous ne m’aimez pas trop et cela me rend bien triste. Pourtant je suis utile vous savez. Je vous apporte de l’énergie quand vous en avez besoin ; je stocke vos provisions en cas de coup dur ; je discute beaucoup avec les collègues - le foie, le cerveau, les intestins. On parle souvent de vous, vous savez. Vous ne me connaissez pas, mais moi, je vous connais bien. Depuis votre naissance, je suis là. Je vous ai vu grandir. Je me suis fait tout petit quand vous alliez bien - et j’ai grossi, grossi, grossi - comme vous-, quand vous alliez moins bien. Alors, ne me maltraitez pas. Ça me fatigue de faire le yoyo et ça me rend malade.”
Robert, l’ami de nos bourrelets
Celui qui vous parle, c’est Robert, un gentil petit adipocyte (comprenez une cellule de graisse) qui n’a pas sa langue dans sa poche. Et ce n’est pas plus mal, car il s’interroge, se questionne et répond ouvertement à toutes les questions que l’on n'ose pas poser, le tout à travers le récit très imagé de son quotidien.
Au fil des 394 pages du monde merveilleux du gras du Dr Laurence Plumey, on s’attache à Robert. Au point de ne (presque) plus vouloir l’éliminer de notre corps. Car oui, le petit bourrelet que l’on tente désespérément de faire disparaître nous est en fait drôlement utile et protecteur. Si si, on vous assure. Et puis, de toute façon, ce petit bourrelet inoffensif est très compliqué à éliminer : c’est le premier arrivé, mais le dernier parti...
les 5 fonctions de nos cellules graisseuses
Et s’il ne part pas, c’est pour une bonne raison. Enfin, pour 5 bonnes raisons. En plus d’être une gigantesque réserve énergétique (une personne en bonne santé stocke au minimum 10 kilos de graisses, ce qui représente 80 000 calories… ou 40 jours de jeûne), il participe aussi à la synthèse des hormones sexuelles, à la communication avec d'autres organes pour que l’on se sente rassasié. Mais, surtout, les cellules graisseuses stockent les polluants (pesticides, additifs) que l'on ingurgite au quotidien. Et ça, c’est une très bonne chose, car le corps ne sait pas les éliminer. Du coup, au lieu d’avoir des pesticides en libre circulation dans notre corps qui risqueraient d’endommager et d’intoxiquer nos organes vitaux, notre graisse les emprisonne.
Et puis, le tissu adipeux n’est pas seul dans son coin, il communique avec d’autres organes, comme le vulgarise Laurence Plumey : “Dans notre cerveau, il existe une cellule, la leptine, qui est chargée de réguler notre poids. Elle agit comme un bureau de contrôle, qui diminue l’envie de manger ou pousse à vouloir bouger. Pour pouvoir fonctionner, cette cellule est en relation avec le tissu adipeux qui lui envoie des messages.”
Avec tout ça, vous pensez toujours que le gras est mauvais pour la santé ?
Un petit bourrelet, c’est signe de bonne santé… jusqu’à un certain point
On l'a compris, le gras est utile. Jusqu’à une certaine quantité. Trop ou trop peu, et voilà les problèmes de santé qui débarquent. Car si le petit bourrelet du ventre est inoffensif voire carrément protecteur vis-à-vis de notre santé, il devient dangereux quand il s'étend et s’installe durablement.
“Plusieurs raisons peuvent nous pousser à manger et prendre du poids ( sédentarité, arrêt du sport, dépression, médicaments, disposition génétique, environnement,ménopause, sevrage). Le corps fonctionne comme une banque : lorsqu’elle a trop d’argent, elle fait des économies. C’est pareil pour notre corps : lorsqu’il y a trop de calories, le corps les stockent sous forme de graisse." explique Laurence Plumey.
Mais c’est encore Robert qui en parle le mieux : “On est les seuls dans le corps humain à être capables de gonfler et de dégonfler jusqu’à 15 fois notre volume. Et quand on n’en peut plus, on appelle à la rescousse d’autres copains qui vont nous aider à stocker davantage.” Autrement dit, lorsque les adipocytes atteignent leur limite de taille, ils recrutent d'autres cellules pour les transformer elles-aussi en cellules graisseuses et être toujours plus nombreuses.
De la graisse qui s’installe durablement
Et, une fois que ces cellules graisseuses s’installent et grossissent, on aura bien du mal à les déloger. Finalement, ces cellules de graisse sont comme vous et moi : quand elles s'installent confortablement dans un nouvel appartement, elles ne veulent pas en être délogées et comptent y rester longtemps.
Pour ne pas en arriver là, il faut réagir vite, dès l'enfance. “Un enfant en surpoids à 10 ans restera, dans 70% des cas, en surpoids dans sa vie adulte” explique Dr Laurence Plumey. Car plus on attend, et plus le tissu adipeux (le tissu formé de toutes ces cellules de graisses) devient fibreux et moins réactif aux régimes et à l’activité physique.
Toutes ces explications, on les retrouve dans Le monde merveilleux du gras. Mais ce n'est pas tout. Le livre fait aussi le point sur les facteurs qui nous poussent à grossir (manque de sommeil, excès alimentaire, arrêt de l’activité physique, hérédité génétique, stress, régimes à gogo, changements hormonaux, etc.) et nous réapprend les bonnes habitudes à adopter pour rester en bonne santé.
Le monde merveilleux du gras, Dr Laurence Plumey, Editions Eyrolles, 20 euros.
Interview réalisé par Aude Bouquet des Chaux