C’est l’économie de toute une région qui risque de pâtir de la hausse des coûts de l’énergie, les 4 000 producteurs Français étant à 95% situés dans les Hauts-de-France (Source : chambre d'agriculture des Hauts-de-France). A l’échelle nationale, ce n’est pas non plus une nouvelle anodine. On s’inquiète des conséquences de cette situation "historique" et "grave" comme le présente la présidente de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles Christiane Lambert au micro de France Inter le 18 août dernier.
Les termes sont forts, mais choisis à juste titre. Si la France, alors premier producteur mondial d’endives avec une production atteignant les 160 000 tonnes chaque année, ne peut plus répondre à la demande, c'est tout un système qui risque d'être ébranlé.
Chambres froides et chauffage au sol pour les endives
Si les producteurs connaissent de sévères difficultés en ce moment, c’est à cause du coût de l’énergie qui ne cesse d'augmenter. Cela est dû à différents facteurs : la reprise économique mondiale après un ralentissement lié à la Covid-19 d'une part, et à la guerre en Ukraine d'autre part. Pour rappel, la Russie était un producteur et exportateur clé. Ne plus avoir recours à cette production entraîne inévitablement une baisse de l'offre malgré une demande toujours accrue. Et là, c'est un effet boule de neige qui commence puisque les prix de l'électricité dépendent en partie de ceux du gaz, mais aussi des coûts d'acheminement, de stockage et de quotas de CO2.
Et ça pose particulièrement problème pour les cultures d'endives qui sont très gourmandes en énergie. Après récolte, les racines doivent être maintenues dans des chambres froides, sortes de frigos géants, avant d'être replantées dans de grands hangars chauffés. Ce deuxième temps de pousse, que l’on appelle forçage, est encore plus énergivore que l'étape précédente. On parle de chaufferie centrale ou de chauffage en sol qui tournent pendant 3 à 6 semaines par récolte.
Nos confrères de Challenges ont interrogé les endiviers, les premiers concernés par la crise. L’un d’eux ne voit pas comment s’en sortir. Habituellement, 3 à 4% de son chiffre d’affaires partaient dans les factures d’électricité. Ce pourcentage passe à 10% en 2022… et risque d’atteindre les 30% en 2023. Et l’endivier de se confier au média Challenges. "Ce n'est tout simplement pas tenable. Je viens de recevoir une proposition d'un courtier en électricité qui me propose un contrat pour un million d'euros sur trois millions de chiffre d'affaires annuel".
Les consommateurs seront directement impactés
Pour réussir à joindre les deux bouts, les endiviers n’auront pas d’autre choix que d’augmenter leur prix de vente. Habituellement vendues autour de 3 euros le kilo, les endives pourraient se vendre aux alentours de 4 euros cette année (Source Challenges).
Dans un contexte d'inflation sévère du secteur alimentaire (+10% en septembre 2022 d'après l'Insee), les Français ne sont peut-être pas prêts à mettre la main au porte-monnaie, quand bien même la cause soit justifiée et le produit désiré. En 2017, on a acheté 6,7kg d'endives par ménage pour en faire des endives au jambon, une tatin d'endives ou une salade d'endives aux noix, aux poires et au roquefort. Avec les prix au kilo qui augmentent et le pouvoir d'achat qui baissent, les endives que l'on boudait à la cantine deviendront-elles un mets de luxe ?