Un sourire franc et une énergie débordante, Alexandre Marchon a su marquer les esprits par sa jovialité. Il n’a pas hésité à mouiller sa veste de cuisinier chaque semaine pour tenter de rester dans le concours. C’est après huit semaines d’aventure que le candidat a été éliminé. Un beau parcours malgré tout pour ce jeune chef autodidacte. “J’étais très triste de partir de Top Chef, je crois que ça s’est vu, nous a confié Alexandre Marchon. J’étais déçu car j’aurais aimé aller plus loin”.
Ce cuisinier au parcours atypique a quitté du jour au lendemain son travail dans le milieu de la publicité pour se consacrer à sa vraie passion : la cuisine. Il ouvre son restaurant en 2020 mais avec le Covid tout se complique. Top Chef l’a aidé à retrouver l’enthousiasme et l’envie de cuisiner : “J’ai dû faire face comme beaucoup de restaurateurs à la pandémie mais sans aide de l’Etat, j'ai vraiment tenu pendant deux ans mon restaurant à bout de bras et c’est vrai que j’ai plus eu la tête dans les factures et dans la gestion qu’en cuisine et Top Chef ça m’a permis de raviver un petit peu la flamme de cuisinier qui était un petit peu éteinte en moi”.
Le bilan de l’aventure est donc positif pour le candidat : “Je pense avoir trouvé mon style. Et pour autant quand on est autodidacte comme moi, faire un concours face à des cuisiniers plus expérimentés au niveau de la technique c’est vrai que c’est difficile. La leçon que je retire de l’émission, c’est que je sais bien faire ma cuisine et c’est déjà une très bonne chose”.
Et justement, c’est pour que le chef nous parle de sa cuisine que nous l’avons rencontré. Une cuisine, principalement végétale, où les légumes sont les vraies stars de l’assiette.
La cuisine végétale vue par Alexandre Marchon
Pourquoi vous êtes-vous tourné vers la cuisine végétale ?
Les légumes, c’est ce que j’aime particulièrement cuisiner parce que je trouve que la palette aromatique qu’ils offrent est tellement riche, tellement grande. Et puis je trouve ça génial de devoir se priver d’un fruit par exemple pendant 9 mois, 10 mois et de le retrouver simplement pour quelques semaines/mois tous les ans. En ce moment, on a les petits pois, les asperges, les fèves… Mais si je cuisine également ces produits c’est par engagement écologique. D’ailleurs, je ne travaille qu’avec des producteurs Bio, ce qui veut dire des circuits courts, des petits agriculteurs, des pêcheurs qui pêchent responsable etc…
D’où vient cet intérêt pour les légumes ?
Le premier qui m’a fait découvrir cela, c’est Alain Passard. J’ai eu la chance d’aller souvent à l’Arpège, il y a quelques années, quand j’entamais justement ma reconversion. Sans le savoir, ce chef a façonné mon palais et mon goût pour les légumes, il y a plus de dix ans quand je l’ai rencontré. Il m’a offert la possibilité de déguster sa cuisine et je pense qu’il a formé mon palais et il m’a démontré qu’on pouvait faire des choses très gourmandes, très goûteuses et pas ennuyeuses avec des légumes.
Dans votre assiette, la viande ou le poisson sont secondaires, les vraies stars ce sont les légumes, comment vous faites pour y parvenir ?
Il y a plusieurs possibilités de mettre en valeur les légumes. Il faut simplement savoir les sublimer avec de la viande, par exemple une fine tranche de colonnata posée sur une feuille de chou kale ou encore un jus de volaille qui vient arroser une asperge, des oeufs de brochet fumé qui viennent simplement terminer un risotto aux petits pois : ce sont des petits éléments comme ça qui sont au service des légumes et qui font toute la différence. Je viens simplement assaisonner les légumes avec des éléments carnés ou de la mer.
Votre recette signature est le Carpaccio de navet, pourquoi ce choix ?
Ce qui me plait dans cette recette c’est qu’on a pas souvent l’habitude de manger du navet cru. J’aime bien faire découvrir à mes clients ce goût assez poivré du navet cru. J’apprécie dans cette préparation l’accord avec le praliné à la noisette qui est pour le coup un élément de pâtisserie. C’est ce choc qui est très intéressant.
Les astuces du chef
Quelles sont vos astuces faciles pour donner du goût aux légumes ?
Blanchir très peu ses légumes, les cuire dans de l’eau, ça dilue le goût des légumes, je trouve ça dommage. Un bon exemple en ce moment, ce sont les asperges blanches. Une fois qu’on les a épluchées, les faire rôtir c’est bien meilleur que de les cuire trop longtemps à l’eau ou à la vapeur. Il suffit de les mettre dans une poêle très chaude avec une belle huile neutre et on vient les terminer au beurre moussant et cela permet aux légumes de garder toute leur jutosité. En général, je trouve que le beurre se marie très bien avec les légumes. Le beurre permet vraiment de les rendre gourmands. Dès qu’on fait une purée, par exemple, il faut toujours finir par une noisette de beurre.
Quels sont vos meilleurs condiments ?
Je travaille beaucoup les vinaigres. Par exemple, dès qu’on a un légume vert qu’on fait sauter à la poêle, je viens toujours le déglacer avec un bon vinaigre ce qui permet d’apporter un peu d’acidité et de sucre sur les légumes. Autre condiment, au restaurant on fait une harissa maison qui est un condiment que j’utilise beaucoup et qui se marie bien avec certains légumes.
Votre conseil pour faire manger des choux de Bruxelles aux enfants ?
Simplement, de bien les cuisiner et de les respecter. En premier lieu, il faut arrêter de bouillir tous les légumes. J’ai des souvenirs de courgettes bouillies, de salsifis bouillis à la cantine. Quand c’est bouilli, ça n’est pas bon et c’est souvent trop cuit. C’est important de garder du croquant dans tous les légumes ou sinon à l’inverse les transformer en purée avec du beurre ou même en sauce comme des pâtes avec une sauce au butternut.
Portrait culinaire
Vos légumes préférés ?
C’est trop difficile de répondre à cette question. En ce moment, je dirai que ce sont les asperges. En plein hiver, je vous dirai que c’est le chou et puis là cet été je vous dirai que ce sont les haricots verts. Je suis fou de tous les légumes et je trouve que la contrainte naît de la créativité et quand on est obligé de cuisiner avec un nombre restreint de fruits et légumes parce qu’on cuisine en bio et de bonne saison, forcément on doit se creuser un peu plus la tête et c’est pas plus mal.
Le premier plat qui vous vient à l’esprit ?
La tête de veau de mon papa. Ce n’est pas forcément celui qui me représente le plus mais en tout cas, c’est le plat familial par excellence.
L’épice dont vous ne pouvez pas vous passer ?
J'aime beaucoup cuisiner le piment parce qu’il a énormément de variétés, fort, fumé, doux : il se marie à de nombreuses recettes. C’est également un bel exhausteur de goût.
L’ingrédient qui est votre marque de fabrique ?
Le vinaigre, j’aime beaucoup travailler ce produit et ses multiples déclinaisons pour apporter de l’acidité à mes assiettes.
La première recette que vous avez réalisée ?
Je me souviens quand on était petit, il y avait une recette de gâteau à la banane qu’on faisait à la maison. C’est un beau souvenir !
Quels aliments sont trop sous-côtés d’après vous ?
Tous les légumes d’hiver !
La cuisine, une vraie passion
Pourquoi avoir choisi ce métier ?
C’est pour donner du plaisir et permettre aux gens de passer du temps à table. Aujourd’hui, aller au restaurant, c’est un acte militant. C’est également un acte engagé et je fais ce métier pour pouvoir accueillir les clients et faire en sorte qu’ils passent un moment de plaisir. Je trouve que ces moments- là sont très précieux. C’est souvent des moments entre amis ou en famille, où il se passe toujours des choses. J’encourage les gens à continuer d’aller au restaurant, c’est important et ça permet de faire vivre toute une économie et un savoir faire.
Quels sont vos projets futurs ?
Continuer à bien m’occuper de mon restaurant, c’est la priorité. Et puis si l’année prochaine, j’ai des opportunités pour d’autres affaires, pourquoi pas.